25 janvier 2007

Le voyage immobile

Ryszard Kapucinsky est mort ce matin. Connaissez-vous ce journaliste polonais qui travaillait, je crois, au quotidien belge le Soir. Si vous avez lu Ébène – Aventures africaines, vous n’avez pu oublier ce regard si juste sur ce continent massacré. Des pays qu’il avait l’habitude de parcourir à pied, pendant des semaines, et au plus près des événements sanglants dont il voulait comprendre l’origine. Son témoignage est désespérant et sans complaisance, ni sur les occidentaux, ni sur les dirigeants africains et tous les petits seigneurs locaux qui, déjà au temps de la traite des noirs, faisaient le malheur de leur propre peuple. Je vois sur Internet que le livre existe en pocket ; Corinne a sûrement cet ouvrage en rayon.

Entre deux arrivées de cartons et deux jurons sur l’informatique, elle m’a fait part hier de son souhait de mieux garnir le rayon voyage. À l’heure où les avions sont les plus grands responsables du dégagement de CO2 (deux cents fois le train, sur un même trajet !), il est temps de voyager immobile, bien au chaud et à l’abri des tourista, des moustiques et des arnaques en tout genre. Bien sûr, cela ne concerne pas les vrais découvreurs du monde, les adeptes de la lenteur et du contact humain. Ceux qui fuient les hôtels pleins d’étoiles, les temples au milieu des parkings, les circuits « visite de village indigène », les tests in situ du dernier guide à la mode et l’artisanat local fabriqué à Taiwan. Ceux-là ont déjà tout lu et à chacun de leurs périples, ils s’imaginent, au Japon, emboîtant le pas d’un Nicolas Bouvier (hoëbeke), prenant le thé avec « Msabu » Karen Blixen dans sa ferme au pied du Ngong (Quarto), flânant dans les immensités patagoniennes aux côtés de Chatwin (Grasset) et d’Hudson (Stock), pêchant le cachalot sous les ordres de Franck Bullen (Payot voyageurs), traversant le Gobi à marche forcée dans les traces de Slavomir Rawicz (Phébus), rendant visite aux Yanomani avec Redmond O’Hanlon ((Payot) et surtout, surtout, passant l’hiver arctique en chantant, chassant et buvant au bras de Lasselille, Pedersen, Mads Madsen, Herbert, Valfred et tous les héros des racontars de Jorn Riel (Gaia).
Liste sans fin, bien sûr, mais que d’heures passées en rêve dans toutes les pampas, les steppes, les déserts, les forêts, les montagnes et sur toutes les mers du monde !

Je saute du coq à l’âne, expression dont même Claude Duneton ( Le bouquet des expressions imagées – Seuil) n’a pas la moindre certitude sur l’origine ; c’est vous dire ! Pour partager une idée avec ceux qui, comme cela arrive souvent, se demandent ce qu’ils pourraient bien lire. Et qui sont toujours un peu réticents à se jeter sur « l’ouvrage-incontournable-en-tête-des-ventes » ! La bibliothèque idéale, établie il y a plus de dix ans, par Pivot et son équipe de LIRE reste une référence en la matière. On y trouve une quarantaine de chapitres, classant la littérature par genre ; à chaque chapitre, on trouve le classement des 10 meilleurs livres, puis des 15 suivants, puis de 25 autres méritant de figurer dans cette liste. Bien sûr que tout cela est arbitraire, mais jetez-y un coup d’œil si vous ne l’avez pas fait récemment (la pochothèque), vous verrez comme tout cela est intelligent et fourmille d’idées pour des lectures de qualité et sans fin. Il reste toujours une place en fin de chapitre pour établir votre propre choix. Cela m’a permis de rajouter les 18 racontars de Riel qui, s’ils avaient été disponibles à l’époque, auraient sûrement figuré dans la liste des 10 plus grands romans d’aventure.

Demain, je cède la place à Corinne ; je pars à La Baule, initier un petit groupe de médecins à l’analyse transactionnelle ; la théorie des « moi » enfant, parent, adulte et petit professeur. Si vous n’avez le temps de m’accompagner et que vous voulez, malgré tout, en savoir plus, le mieux est de lire le Triple Moi, de Gysa Jaoui (Robert Laffont), un livre de référence, en dehors, bien sûr, de ceux d’Éric Berne, un psychiatre américain, inventeur de cette thérapie comportementale.
Je vous adresse un triple salut.
À samedi
Le cousin

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