La Plaisanterie

Je vous ai fait part de mes amitiés très fidèles avec des collaborateurs de Gallimard qui me mettent de temps en temps à contribution pour des missions très ponctuelles. La dernière concernait un ouvrage exceptionnel, sorti l’année dernière, sous la plume et le pinceau de Noëlle Herenschmidt, une journaliste-aquarelliste à l’immense talent. Elle a consacré trois années, passées au chevet des malades et auprès des soignants, dans une vingtaine d’hôpitaux de l’Assistance Publique, au recueil de témoignages et à la réalisation de centaines d’aquarelles, dégageant une émotion très particulière. Au total, un ouvrage unique intitulé L’HÔPITAL, un grand format vendu 25 € (authentique !), dont 5 reversés à la Fondation de France. Comme a dit un jour Pivot à Apostrophe (je crois que c’était à propos de Comme Neige au soleil de William Boyd ) : « Achetez le, et je vous rembourse si vous ne trouvez pas que c’est un livre exceptionnel ! ». Une exposition de nombreux de ses dessins aura lieu à l’hôpital Saint-Louis, à l’occasion du 400e anniversaire de sa création, mais je vous le confirmerai.

Pour en revenir à Gallimard, voici quelles sont les trois dernières livraisons que j’ai sous les yeux. Avec Camus – Comment résister à l’air du temps - de Jean Daniel ; où je lis cette phrase de Camus qui me semble étrangement d’actualité « Loin de refléter l’état d’esprit du public, la plus grande partie de la presse française ne reflète que l’état d’esprit de ceux qui la font. À une ou deux exceptions près, le ricanement, la gouaille et le scandale forment le fond de notre presse. » Que ce soit Jean Daniel, le monsieur « Je » de la presse française qui rapporte ces propos, ne manque pas de sel ! À part cela, le livre est passionnant, JeJean omni présent, et Camus au centre d’une effervescence intellectuelle qu’on aimerait retrouver aujourd’hui.
Autre personnage de dimension exceptionnelle, Pierre Mendès France, qu’Éric Roussel présente en partie sous un jour nouveau, dans un livre éponyme, à la lumière de témoignages de proches et d’écrits inédits les plus intimes. L’ouvrage est déjà salué par la presse, comme le fut la biographie du Général de Gaule, du même auteur. Ne l’ayant pas encore lu, je me contenterai de reprendre une phrase de la 4e de couverture, nous incitant à découvrir ce livre qui « éclaire un destin d’exception profondément ancré dans la mémoire nationale. »
Enfin, dernière livraison, Une Exécution ordinaire de Marc Dugain (l’auteur de la Chambre des officiers). J’ai dévoré cette histoire poignante du Koursk, un sous-marin nucléaire russe, disparu en mer de Barents le 12 août 2 000. Où est la vérité, l’information vérifiée, la fiction, qu’importe, cela sonne terriblement vrai et pour mieux nous convaincre, Dugain commence son histoire au sortir de la guerre, en nous faisant découvrir Staline. Il y a trois mois, nous étions avec Hitler dans les Bienveillantes ; dites-moi, ils nous font faire des drôles de rencontres nos romanciers ! D’autant plus que tout cela est écrit de main de maître au point de rendre ces personnages très authentiques. Bref, de Staline à Poutine, le destin inéluctable du sous-marin se met en place, symbole du naufrage d’une société aussi cruelle qu’attachante.
Tout ça n’est pas bien drôle, j’en conviens, mais demain je vous entretiendrai d’un sujet beaucoup plus léger : l’environnement. J’en entends qui s’étranglent ! Ne vous en faites pas, lisez ou relisez Milan Kundera et vous vous persuaderez vite que, de toute façon, cette vie n’est qu’une vaste « Plaisanterie ».
À demain
Le cousin